DEVOTION AMAZIGHE
(’ευσέβεια)
A Cadi Kaddour
« Il n’est pas d’homme plus pauvre que celui
qui ne laisse aucune trace de sa vie »
Sagesse antique
Je pense à toi, Ami immortel,
Pieds nus dans l’herbe frissonnant
Sous l’aimable fraîcheur du soir rifain.
Ce soir ensorcelant
Resté si longtemps clair
A la demande d’une âme innocente,
A l’invocation d’un cœur pur
Qui veut que la lumière de l’amour
Se prolonge à l’infini !
Je pense à toi, Kaddour,
A toi, frère des oiseaux libres,
A toi, ami du Verbe, mort par dévotion
Pour la langue superbe de tes ancêtres.
Les fleurs n’osent plus déranger
Ton ombre qui dort dans les soyeux replis
Du temps solennel !
Un petit froid parcourt les calices des jasmins,
Non celui que souffle la bouche glacée de l’hiver
Qu’ils connaissent si bien,
Mais un froid dense, profond, intérieur qui les fait
Se figer d’effroi !
Endormi dans les bras de l’éternité,
Tu occupes tant de place à présent
Dans le cœur probe de ton peuple,
Tant d’espace dans les paysages enchanteurs de ton pays
Si chers à tes yeux d’adolescent !
Depuis ton soudain départ
Le temps s’est arrêté
Sur les cimes aériennes des montagnes,
Sur les odorants sentiers rifains fuyant
Vers les vallées ondoyantes,
Sur le seuil de ton humble,
De ta chaste demeure !
Imperceptiblement, délicatement l’or
Amoureux du savoir,
Travaillé par les mains dévotieuses de ton âme,
S’est transformé en statue de déesse !
Kaddour, mon vénérable Ami, tu as prouvé
Aux hommes de la Terre que
De n’importe où on peut s’élancer vers le ciel !
Toi qui as partagé ton cœur en deux
Et l’as élevé vers le firmament vêtu d’une neuve lumière.
Toi, seul, debout, doux, souriant
Face à toute la transparence de l’avenir !
Oui, tout est divin, mon Ami,
Pour ceux qui sont faits de clarté,
Cela l’est,
Cela l’a toujours été !
Athanase Vantchev de Thracy