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 La question des droits des Amazighs divise Amazighs et islamistes

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MessageSujet: La question des droits des Amazighs divise Amazighs et islamistes   La question des droits des Amazighs divise Amazighs et islamistes EmptyDim 28 Fév - 7:45

Comme de nombreux Berbères, Lahoucine Amouzay souhaite plus de droits et de respect pour les citoyens marocains d'origine amazighe. Son militantisme le met aux prises avec les partisans d'une identité marocaine exclusivement arabe et islamique.

"Nous vivons en marge", a expliqué Amouzay à Magharebia. "Tout ce que nous obtenons, ce sont des promesses. Si nous ne nous battons pas, nous serons toujours considérés comme un peuple arriéré."

Les Amazighs, communément appelés Berbères, ont été les premiers habitants du Maroc, et représentent encore près de soixante pour cent des quelque 32 millions d'habitants du pays. Mais les militants amazighs affirment qu'ils sont traités comme une minorité par les membres de la culture arabe dominante.

Même à Agadir, où les Berbères sont relativementy affluents et puissants, chaque jour est un combat, selon Amouzay. Comme dans la plupart du Maroc, Agadir présente un profond fossé entre pauvres et riches. Les islamistes imputent en général ces inégalités aux influences occidentales et au capitalisme, tandis que les militants amazighs en font porter la responsabilité à la communauté arabe et à la tendance islamiste.

Amouzay étudie la culture amazighe à l'Université Ibn Zohr d'Agadir, l'une des trois écoles seulement du pays proposant une telle formation. Même les locaux de l'université affichent cette division. Des affiches sur les prisonniers politiques amazighs et des manifestes ornent un mur, tandis que des dépliants sur les groupes de prières islamistes tapissent l'autre. La plupart des militants amazighs portent des T-shirts et des vêtements à l'occidentale, contrastant avec les islamistes qui arborent des vêtements plus traditionnels.

"Ils se battent en permanence... ils arrachent nos affiches", explique Amouzay. "Ils disent que nous devrions être de bons Musulmans, parler l'arabe et rejoindre le monde arabe. Ils affirment que nous inventons nos problèmes, que nous créons notre patrimoine de toutes pièces."

L'un des hauts lieux de ce patrimoine est l'Institut royal de la culture amazighe (IRCAM), dans la banlieue de Rabat, créé en octobre 2001 par un décret royal, dans le cadre d'une série de réformes visant à répondre aux demandes des Amazighs du pays. D'autres changements ont suivi, notamment l'ajout de classes en langue amazighe dans les écoles du royaume et l'adoption officielle d'une transcription amazighe.

Selon Amina Ibnou-Cheikh, membre de l'IRCAM, les réformes lancées par le Roi Mohammed VI, bien qu'empreintes de bonnes intentions, sont de faible portée par rapport aux injustices permanentes. Ainsi, seuls des noms arabes peuvent être enregistrés à l'état civil pour les enfants marocains. Et bien que la majorité du peuple parle des dialectes amazighs, ceux-ci ne figurent pas dans les documents officiels en arabe.

A l'Institut national d'étude et de recherche sur l'arabisation (IERA), non loin de l'IRCAM, un administrateur qui a souhaité conserver l'anonymat, a expliqué que l'identité amazighe est devenue "un champ de mines" sur lequel la plupart des responsables évitent de s'aventurer.

Il explique que l'IERA a pour seul objectif d'arabiser le gouvernement, non le peuple. Après que le Maroc eut gagné son indépendance sur la France en 1956, poursuit-il, le gouvernement a utilisé un mélange d'arabe et de français. En conséquence, l'IERA cherche à harmoniser la terminologie des sciences modernes et de la "civilisation" utilisée dans le monde arabe.

Mais il est clair sur la possibilité d'acquérir un statut de langue nationale pour la langue amazighe. "L'arabe est notre identité. C'est la langue du Coran. Je ne pense pas que cela changera."

La rivalité entre les identités arabo-islamique et amazighe se reflète également en politique. Les partis fondés sur l'ethnie ou la religion étant interdits au Maroc, le Parti démocratique amazigh du Maroc (PDAM) a été interdit en 2008. Mais il continue à fonctionner de manière quasi politique.

"L'un des meilleurs exemples de la situation actuelle est l'interdition raciste du PDAM", explique le secrétaire général de ce parti, Ahmed Adghirni. "Ils disent que nous ne pouvons mentionner le mot 'amazigh' dans notre nom, parce qu'il s'agit d'une ethnie, mais le gouvernement ne traite pas les noms de l'Agence Maghreb Arabe Presse, du Parc de la Ligue arabe [à Casablanca] ou de nombreuses autres institutions de la même manière."

"Nous sommes soumis à une arabisation permanente dans ce pays", ajoute-t-il. "Cela se reflète jusque dans le Code de la famille, dont les Marocains sont si fiers, parce qu'il est censé donner plus d'égalité aux femmes, mais pas autant que ce que les traditions amazighes leur ont donné."

Le Parti pour la justice et le développement (PJD), que beaucoup considère comme islamiste, voit les choses différemment. Aux avants-postes de la politique, le PJD a remporté le deuxième plus grand nombre de sièges au parlement lors des élections de 2007. Son ancien leader, Saadeddine Othmani, est amazigh.

Othmani explique que son parti est encore "indécis" sur le fait que les langues amazighes acquièrent un statut officiel. "Nous sommes un pays musulman, et la plus grande ressource de notre gouvernement est l'Islam", a-t-il expliqué à Magharebia. "Donner aux langues amazighes le statut de la langue de Dieu [l'arabe], c'est une conception délicate."

Othmani avait souhaité que les langues amazighes soient transcrites en arabe, et non selon la transcription amazighe adoptée en 2003. "Pour moi, cela est logique. Il n'existe aucune différence entre Arabes et Amazighs. Utiliser une transcription différente créerait cette différence."

Il ajoute que les Berbères qui se sentent maltraités par les islamistes tombent dans le néocolonialisme à l'occidentale. "L'Islam est un formidable outil de mobilisation politique dans ce pays. Les Marocains sont plus sensibles aux valeurs démocratiques qui viennent de l'histoire islamique que de Montesquieu ou Rousseau. L'identité musulmane et l'identité arabe nous unissent. En quoi cela est-il une mauvaise chose ?"

Mais pour Ahmed Adghirni, les "partis religieux", au rang desquels il inclut le PJD, tentent de les brider. "Ils parlent de religion pour nous faire paraître comme non islamiques si nous revendiquons une forte identité amazighe", explique-t-il. "Ce que ces partis ignorent, c'est que la rhétorique religieuse ne rencontre que peu d'écho parmi les citoyens amazighs ordinaires."

Mohamed Bataoui, étudiant amazigh à l'université de Fez, juge certes la situation politique des Amazighs alarmante, mais explique à Magharebia que les deux camps ont souvent tendance à exagérer les choses. Originaire de Guelmim, il explique avoir fait l'expérience de la discrimination du fait de ses origines, mais avoir développé une capacité à former ses détracteurs.

Amazigh "de culture et d'origine, mais pas d'idéologie", Bataoui explique que la situation politique des Amazighs reste ce qu'elle a toujours été, "caractérisée par l'iniquité et le manque de réel désir de solution politique au sort des Amazighs". Pour lui, le Maroc réécrit souvent son passé, ignorant l'histoire du pays avant l'arrivée des Arabes, il y a des siècles.

Mais malgré les rancoeurs, explique-t-il, les Marocains doivent rester un peuple uni, même lorsque de telles questions les divisent. "Les Arabes et les Amazighs sont égaux, et resteront toujours égaux. Notre religion islamique insiste sur la tolérance et l'amour de l'autre."

source : Magharebia.com
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